Que s’était-il passé durant l’Heure Sainte de la chère victime, au cours de son colloque avec son Divin Époux ? C’est le secret divin ! Mais elle avait eu certainement connaissance du jour et peut-être de l’heure de son trépas.
Vers 10 heures du matin, ce vendredi 27 juillet, Madame Léonie Bagnoli, belle-sœur de Mathilde, venue de Marseille à Lyon pour voir la malade, dit à Sœur Marie-Catherine : « Tu sais, je vais m’embarquer ce soir pour Marseille, mais je reviendrai bientôt ». « Non, ne pars pas, je viendrai avec vous » répondit-elle à Madame Léonie. Elle ajouta encore : « Je partirai avec vous ». « Nous ne tarderons pas beaucoup à nous en aller », dit à son tour Madame Bagnoli, « Mais cependant, pas en même temps que toi, parce que tu es trop faible en ce moment, pour te mettre en voyage. »
Nouvelle insistance de la novice : « Nous partirons toutes ensembles. On veut m’opérer encore du rein, mais je n’y consentirai pas. D’ailleurs, je ne serai plus là, je partirai avec vous ».
Et c’est toujours dans ce sens, qu’elle conversa avec sa sœur, dans cette inoubliable matinée, tandis qu’à l’endroit de la Rde Mère, elle garda un mutisme absolu sur l’approche imminente de son trépas, cela, par l’effet de son amour filial, envers celle qu’elle affectionnait si profondément et si religieusement et dont elle voulait ménager la douleur maternelle.
Environ vers 1 heure et demi de ce jour, Monsieur et Madame Édouard Broyer, amis profondément dévoués, vinrent rendre visite à la chère petite novice, à la salle Olier. La douce malade leur fit signe d’approcher de sa couche, leur serra la main avec la plus vive affection et tourna ensuite son regard vers le Ciel, avec un doux sourire, dont l’expression était intraduisible, tant il revêtait une beauté céleste, déclarèrent les visiteurs…
« Évidemment, elle nous donnait rendez-vous là-haut », écrivirent-ils à la Rde Mère Prieure… « Ce que nous sommes heureux, mon mari et moi, d’avoir eu le privilège de recevoir le dernier serrement de main et le dernier sourire de votre angélique Fille, une heure avant son départ pour le Paradis ! »
L’entrevue terminée, ces deux personnes, confièrent à la Rde Mère, l’édification que leur avait causée la vue de cette jeune novice, son grand calme, sa touchante sérénité, en présence du martyre effroyable qu’elle endurait.
Après leur départ, la Rde Mère regagna la salle Olier, demeurant près de la couche de la généreuse et courageuse victime, priant de toute son âme pour celle qu’elle était impuissante à soulager…
Tout à coup, vers 2 heures et demi, Sœur Marie-Catherine pour la troisième fois est saisie d’un frisson, semblable à ceux des deux jours précédents. À l’expression de ses traits, on devinait qu’elle devait beaucoup souffrir, mais pas la plus légère plainte ne s’exhalait de ses lèvres !
Sa sœur Mathilde lui ayant posé cette question : « Tu souffres beaucoup, ma sœur chérie ? », levant aussitôt les yeux au Ciel, elle lui fit cette réponse : « Il n’y a que le Bon Dieu tout seul, qui sait ce que je souffre ! ».
Ce furent ses dernières paroles…
Elle s’étendit sur le côté droit, la tête quelque peu inclinée, attitude qu’elle conserva jusqu’à son dernier soupir. Elle ferma la bouche et garda dès lors, un silence absolu jusqu’à l’heure suprême !
« Nous étions là », dit la Rde Mère, « Sans cesse à ses côté, priant incessamment pour elle. À la décomposition de ses traits, nous comprîmes que le moment fatal approchait… Nous fîmes appeler Monsieur l’Aumônier, qui arriva aussitôt, adressa quelques paroles réconfortantes à la mourante, lui donna une dernières absolution, lui appliqua l’indulgence in articulo mortis, récita avec nous cinq Pater et cinq Ave et se retira visiblement attristé lui-même ».
Sœur Bannette pria la Rde Mère de commencer les prières de la recommandation de l’âme, au cours desquelles la chère et courageuse victime, l’enfant privilégiée de la Vierge Marie, expira, mais si doucement que nous, qui étions tout proche d’elle, ne pûmes surprendre son dernier soupir !
Beati Mortui qui in Domino moriuntur